
Le modèle Tubbe en maison de repos : une révolution douce venue du Nord
Dans un monde vieillissant où la question du bien-être des aînés devient cruciale, un vent venu de Suède souffle sur les maisons de repos belges : le modèle Tubbe. À contre-courant des structures traditionnelles souvent rigides, Tubbe propose un changement de paradigme. Ce modèle place les résidents au centre des décisions, dans une logique de participation active, de vie communautaire et de bienveillance partagée.
Mais que signifie concrètement ce modèle pour les Seniors, les professionnels du secteur et les familles ? Quel rôle joue la Fondation Roi Baudouin dans la diffusion et le soutien de ce modèle en Belgique ? Et combien d'établissements ont aujourd’hui franchi le pas vers cette transformation profonde ? Cet article fait le point, sans faux-semblants.
1. Origine et philosophie du modèle Tubbe : repenser la maison de repos
Une naissance en Suède, un besoin universel
Le modèle Tubbe tire son nom d’un petit village suédois où une maison de repos a expérimenté un système révolutionnaire basé sur la démocratie participative, le respect de la personne et la cohabitation bienveillante. Ce n’est pas une méthode figée, mais une philosophie de gestion et d'accompagnement du grand âge, née de la volonté de briser l’image institutionnelle et impersonnelle des maisons de repos traditionnelles.
L’idée centrale : rendre les résidents acteurs de leur quotidien. Fini les décisions prises exclusivement par la direction ou le personnel soignant. Dans un établissement Tubbe, chaque résident peut avoir son mot à dire, participer aux décisions qui le concernent, et contribuer à la vie collective selon ses envies et ses capacités.
Un modèle basé sur quatre piliers
Le modèle Tubbe repose sur quatre piliers fondamentaux :
- Démocratie participative : Les résidents, le personnel, les familles et parfois même les bénévoles participent ensemble aux décisions du quotidien. Cela peut concerner l’organisation des repas, des activités, des horaires, ou même le recrutement du personnel.
- Qualité de vie et bonheur au travail : Le bien-être du personnel est considéré comme un élément central de la qualité de vie des résidents. Un personnel écouté, respecté et motivé crée un climat favorable pour tous.
- Autonomie et responsabilisation : Les résidents ne sont pas infantilisés. On valorise leurs compétences, leur histoire, leur singularité. Cela favorise l’estime de soi et le sentiment d’utilité.
- Ouverture sur l’extérieur : Le lien avec la communauté locale est encouragé. Les maisons Tubbe s’ouvrent à leur quartier, accueillent des enfants, des artistes, des voisins, et créent ainsi une véritable vie sociale.
2. Tubbe en pratique : une autre manière de vieillir ensemble
Un quotidien où chacun compte
Dans une maison de repos qui suit le modèle Tubbe, les décisions ne viennent pas "d’en haut". Des conseils de résidents sont mis en place, les réunions d’équipe sont ouvertes aux aînés qui le souhaitent et les initiatives personnelles sont encouragées.
Par exemple, si un résident aimait jardiner, on ne lui proposerait pas simplement un atelier "jardinage" : on pourra lui confier l’entretien d’un espace vert ou d’un potager, avec un vrai rôle et une reconnaissance. Une résidente passionnée de tricot pourra initier des ateliers intergénérationnels avec des écoles voisines. Les idées fusent, et les murs de l’institution s’ouvrent peu à peu.
Redonner du sens au travail soignant
Pour le personnel soignant, l’approche Tubbe est aussi une bouffée d’air. Elle casse le modèle hiérarchique figé et donne plus d’autonomie aux équipes. Le personnel est encouragé à innover, à proposer, à se former, à sortir des routines épuisantes.
Résultat : une baisse du turn-over, une ambiance plus apaisée, moins de burn-out, et une plus grande fidélisation. Le travail reprend du sens, et cela se ressent immédiatement sur la qualité de l'accompagnement.
Des effets mesurables
Plusieurs études menées en Suède et dans d'autres pays européens montrent des effets concrets :
- Une diminution des troubles du comportement chez les personnes atteintes de démence.
- Une réduction de la consommation de psychotropes.
- Une augmentation de la satisfaction des résidents et des familles.
- Un climat de travail amélioré pour le personnel.
3. La Fondation Roi Baudouin : levier de changement
Un rôle moteur en Belgique
La Fondation Roi Baudouin (FRB), acteur majeur du changement social en Belgique, s’est très tôt intéressée au modèle Tubbe. Convaincue de son potentiel transformateur, elle a lancé un programme d’accompagnement dès2018, en partenariat avec des experts suédois et belges.
Son objectif : faire émerger des "maisons Tubbe" pilotes, les documenter, en tirer des enseignements, puis diffuser les bonnes pratiques dans tout le pays.
Un accompagnement concret
La FRB ne se contente pas de promouvoir le modèle. Elle soutient financièrement les maisons de repos qui souhaitent s’engager dans cette voie. Elle met aussi à leur disposition des coachs, des outils méthodologiques, des formations, et des espaces d’échange entre pairs.
Chaque établissement volontaire bénéficie ainsi d’un accompagnement sur plusieurs années, avec une évaluation régulière, des ajustements, et surtout un soutien moral fort dans cette démarche exigeante.
Une volonté de changement systémique
L’ambition de la FRB est claire : il ne s’agit pas de créer quelques îlots d’excellence, mais bien d’impulser un changement de culture à l’échelle du pays. C’est pourquoi elle travaille aussi avec les autorités régionales, les fédérations du secteur, les écoles de soins infirmiers et les centres de formation.
4. État des lieux en Belgique : où en est-on ?
Combien de maisons de repos ont adopté le modèle Tubbe ?
À ce jour (2025), plus de +-222 maisons de repos en Belgique ont rejoint le programme Tubbe avec le soutien de la Fondation Roi Baudouin. Elles sont réparties dans les trois régions du pays : la Flandre, la Wallonie et Bruxelles.
Ces établissements ne sont pas nécessairement luxueux ou dotés de grands moyens. Certains sont publics, d’autres privés, d’autres encore associatifs. Ce qui les unit, c’est une volonté de remettre l’humain au cœur du soin, au-delà des contraintes budgétaires ou administratives.
Le site de la Fondation recense d’ailleurs les établissements engagés, avec des témoignages, des vidéos, et des retours d’expérience inspirants.
Des défis à surmonter
Le modèle Tubbe n’est pas une solution miracle. Il demande du temps, de l’énergie, et un vrai changement de posture managériale. Plusieurs freins peuvent ralentir son adoption :
- La surcharge administrative qui pèse sur les directions.
- Le manque de personnel dans certaines régions.
- Des résistances internes au changement.
- La difficulté à impliquer durablement les familles.
Mais les retours sont globalement très positifs, et le modèle fait de plus en plus d’adeptes, y compris parmi les autorités politiques qui y voient une réponse innovante au vieillissement de la population.
5. Pourquoi le modèle Tubbe est une réponse d’avenir
Vieillir autrement
Dans une société où les baby-boomers arrivent massivement à l’âge de la retraite, la question du vieillissement devient centrale. Le modèle Tubbe propose une réponse respectueuse, humaine, inclusive. Il ne cherche pas à infantiliser ni à "gérer" les aînés, mais à cohabiter avec eux, à créer un espace de vie où chacun se sent utile, libre et digne.
Une approche soutenable
Contrairement à certaines innovations technologiques coûteuses et inaccessibles, Tubbe repose sur des principes simples, reproductibles, et adaptés à tout type de maison de repos. Il ne demande pas forcément plus d’argent, mais une autre manière d’organiser les choses.
Et cette approche durable est aussi une manière de valoriser les métiers du soin, souvent en crise. En rendant le travail plus humain, on attire et on retient mieux les talents.
6. En conclusion : changer les règles du jeu
Le modèle Tubbe n’est pas une mode. C’est une transformation profonde, une révolution douce, qui remet l’écoute, la participation et la confiance au centre de la vie en maison de repos. Grâce à la Fondation Roi Baudouin, ce modèle fait son chemin en Belgique, pas à pas, établissement après établissement.
Mais pour qu’il devienne une norme et non une exception, il faudra un engagement collectif : des politiques publiques ambitieuses, des directions courageuses, des soignants motivés, et des citoyens exigeants. Car vieillir dignement, cela devrait être un droit, pas un privilège.
Et si demain, chaque maison de repos devenait un lieu de vie, d’échange et de bonheur partagé ? Le modèle Tubbe montre que c’est possible. Encore faut-il oser franchir le pas.
Sources utiles :
- Fondation Roi Baudouin – Programme Tubbe : https://kbs-frb.be/fr/tubbe
- Témoignages et outils pratiques sur les maisons de repos Tubbe
- Rapports d'évaluation des établissements accompagnés
- Publications sur le vieillissement actif et les modèles participatifs en soins
- https://tubbe.be/fr/ 
- Etablissements Partenaires référencés « Modèle d’organisation novateur Tubbe » sur www.myseniors.be dans les services proposés